Simone de Beauvoir aujourd'hui
Quelques annotations critiques à propos d'une auteur classique du féminisme
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Roswitha Scholz
(Edition Le Bord de l'eau - traduit de l'allemand par Stéphane Besson)
Voir
L'avant-propos de Ronan David à l'ouvrage Simone de Beauvoir aujourd'hui.
Présentation :
L’ouvrage, Simone de Beauvoir aujourd’hui, constitue le premier ouvrage traduit et publié en français de l’allemande Roswitha Scholz, figure de proue de la critique de la valeur. Au sein de ce mouvement critique, Scholz a développé à travers de nombreux ouvrages, le concept de dissociation/valeur permettant de penser la domination particulière des femmes au sein du capitalisme comme une domination liée à la forme marchandise. À cet égard, Roswitha Scholz occupe une place singulière dans le paysage féministe puisqu’elle rejette tour à tour les postures du féminisme différentialiste incarnées notamment par Luce Irigaray, du féminisme matérialiste de Christine Delphy et encore des gender ou queer studies incarnées par Judith Butler. Roswitha Scholz réussit, au sein de ce court essai, le tour de force de passer en revue ces diverses postures à travers une critique exigeante des positions classiques de Simone de Beauvoir.
L’auteur explore ainsi les arguments existentialistes du Deuxième sexe de Simone De Beauvoir pour les confronter au cadre contemporain de la socialisation capitaliste. Sans renier les apports de ce travail fondateur, Roswitha Scholz s’attache ici à démontrer les limites de ceux-ci notamment à travers la critique de la figure de l’Autre Beauvoirienne qui reste trop souvent perçue indépendamment de sa constitution spécifique dans le régime historique du capitalisme. Scholz s’efforce ainsi de radicaliser les thèses Beauvoiriennes et de les inscrire dans le contexte d’un patriarcat producteur de marchandises évacué partiellement par De Beauvoir et par les relectures critiques de Judith Butler fondant la totalité sociale sur une totalité de langage et de discours. Roswitha Schloz s’oppose finalement de manière véhémente aux appropriations opportunistes récentes et fades de De Beauvoir pour maintenir l’exigence d’une pensée critique de l’Autre sexe en tant qu’être dominé au sein de la société capitaliste fétichisée en pleine crise existentielle.
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Ex-membre de la revue allemande Krisis, ROSWITHA SCHOLZ participe depuis 2004 à la revue Exit !. Ses réflexions portent sur la domination patriarcale et s’inscrivent dans le courant de la « critique de la valeur-dissociation » (Wertabpaltungskritik) dont le principal inspirateur en Allemagne a été Robert Kurz (1943-2012). Elle a notamment développé la notion de « valeur-dissociation » et est l'auteure de plusieurs ouvrages qui ne sont à ce jour pas publiés en langue française, dont Das Geschlecht des Kapitalismus. Feminische Theorie un die postmoderne des Patriarchats [Le Sexe du capitalisme. La théorie féministe et la métamorphose postmoderne du patriarcat - Horlemann, 2000].
Une présentation des réflexions de Scholz a été proposée par Johannes Vogele dans son article « Le côté obscur du Capital. ‘‘Masculinité’’ et ‘‘féminité’’ comme piliers de la modernité » (in Sexe, capitalisme et critique de la valeur, Vassort et Poulin (dir.), M éditeur, 2012). On retrouvera également le texte de Scholz, « Le sexe du capitalisme. Remarques sur les notions de ‘‘valeur’’ et de ‘‘dissociation-valeur’’ » (voir la rubrique Genre et dissociation-valeur sur ce site), ainsi que « Le queer a fait son temps » et « Théorie de la dissociation sexuelle et théorie critique d'Adorno ». La philosophe Clara Navarro Ruiz vient de faire paraître un entretien avec R. Scholz, « Wert-Abspaltung, Geschlecht, und Krise des Kapitalismus » [Valeur-dissociation, genre et crise du capitalisme] (traduit également en castillan).
Roswitha Scholz