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Parution de EXIT ! n°17, mars 2020

Crise et Critique de la société marchande

SOMMAIRE

Robert Kurz - Un tour gratuit dans le chaos de la crise

Roswitha Scholz - Le capitalisme, la crise... le divan et le déclin du patriarcat capitaliste. Quelques remarques critiques sur le marxisme lacanien de Slavoj Žižek et de Tove Soiland

Thomas Meyer - Au sujet de la misère jamais brisée du positivisme – une note tardive sur l''affaire Sokal'

Andreas Urban - Histoire des maisons de retraite en tant qu'institution moderne

Leni Wissen - Au sujet de l'histoire de l’assistance des pauvres

Gerd Bedszent - La marche vers la barbarie ou l'Est comme croque-mitaine

 

Éditorial, lettre ouverte et appel aux dons

Roswitha Scholz

   Au plus tard depuis le krach financier de 2007/2008, on observe un renversement des perspectives politiques : après l'époque néo-libérale où l'on repoussait toute frontière, le salut est à nouveau vu dans la limitation. On peut observer un retour en force à la nation ou aux régionalismes. Dans le sens du "make America great again" et du "America First", Trump fait de la nécessité une vertu, car la puissance mondiale que sont les États-Unis a depuis longtemps commencé à décliner par des processus complexes de dégradation : des tarifs douaniers protecteurs sont imposés, des guerres commerciales sont menées (surtout contre la Chine). Pendant ce temps, la dette nationale des États-Unis continue d'augmenter malgré l'imposition de tarifs douaniers protecteurs. Des efforts accrus sont déployés pour empêcher l'entrée des réfugiés venant du Mexique, etc. Le Brexit, bien sûr, est également une expression de ce retour de la frontière. Le débat à son sujet montre clairement les contradictions qui résultent de l'imbroglio de l'économie et de la politique mondiales, et qu'il n'est pas possible de sortir facilement de la mondialisation. Cela deviendra probablement encore plus évident après l'élection de Boris Johnson.

   Partout dans le monde, des personnages bizarres et détonnants et des partis de droite qui s'appuient sur des « vérités » simples sont élus : Orbán, Kaczyński, Erdoğan, Duterte, Trump, Bolsonaro - la liste ne cesse de s'allonger. Pendant ce temps, Trump cède la Syrie à Poutine et jette les Kurdes à Erdoğan. Le rêve des anti-impérialistes, le retrait et la retenue des États-Unis, s'avère être un cauchemar. La guerre par procuration au Yémen entre l'Iran et l'Arabie Saoudite et ses conséquences dévastatrices ne sont, sur un ton de culpabilité démonstrative, mentionnées que de temps en temps dans nos médias. De nombreux scénarios et situations de catastrophe sont devenus habituels et ne font les gros titres que lorsqu'un problème se pose sous une forme aiguë, comme la situation désastreuse des services sociaux en Grèce il y a quelques années, dont on n'a pratiquement plus entendu parler depuis alors qu'elle ne s'est certainement pas beaucoup améliorée. En toile de fond, il y a la menace d'une énorme crise économique/financière, dont Nouriel Roubini met en garde en affirmant qu'elle ne pourrait plus être politiquement gérée, comme ce fut encore le cas en 2008 et les années suivantes[1]. Tout le monde le sait. La « littérature de crise » est donc en plein essor. Le livre de Marc Friedrich et Matthias Weik Le plus grand krach de tous les temps. Économie, politique, société. Comment vous pouvez encore protéger votre argent[2] est numéro 1 sur la liste des best-sellers du Spiegel.

   Dans le même temps, non seulement le problème du logement mais aussi celui du changement climatique inquiète les contemporains, et il est bien évident que des contre-mesures au niveau national, régional et local ne sont plus suffisantes. Les Verts eux-mêmes ne sont qu'une mesure palliative pour s'assurer que rien ne puisse vraiment changer, mais que tout puisse être arrangé de façon immanente. Des figures comme Greta Thunberg deviennent des stars.[3] Le mouvement des femmes se reconstitue dans le monde entier après le débat sur « #me-too » et exprime avec force son indignation à travers des grèves/ manifestations, par exemple en Argentine ou en Espagne. L'agitation sociale contre les réductions des services sociaux se fait également sentir en Argentine, par exemple. L'augmentation du prix de l'essence ou du métro est la goutte d'eau qui fait déborder le vase en Iran et au Chili ; dans plusieurs États arabes, la situation est explosive (la liste pourrait être rallongée). Ainsi, les troubles sociaux se ravivent encore et encore et sont « traités » en conséquence par les gardiens matraqueurs et des fusillades (avec plus de 100 morts en Iran).[4] Le système des partis devient de plus en plus obsolète et dénué de tout contenu. Les « partis populaires » s'érodent, les Verts et l'AfD sont en hausse. Dans le même temps, la situation économique devrait s'assombrir, non seulement en Allemagne, mais aussi dans le monde entier. En Allemagne aussi, un grand nombre de voix s'élèvent pour réclamer la fin de la politique d'austérité, notamment pour stimuler l'économie, ce qui ferait bien sûr augmenter la dette publique.

   Il est donc encore et toujours nécessaire de comprendre les sociétés comme une structure contradictoire, et cela - c'est ce qui est le point décisif – sur fond du déclin du capitalisme. L'« effondrement de la modernisation » (Robert Kurz) se manifeste dans des conditions anomiques et imprévisibles. Ce qui est observé aujourd'hui comme état des lieux et comme tendance peut se présenter différemment demain. Outre les tendances de droitisation actuelles, des protestations se font également sentir qui ne peuvent être qualifiées de réactionnaires comme le font les anti-allemands (des larges sections des anti-allemands eux-mêmes représentent d'ailleurs aujourd'hui des positions proches de l'AfD, surtout la rédaction de Bahamas), comme en témoignent les mouvements féministes et pour le climat qui transcendent les frontières nationales (même si on y  trouve aussi des tendances douteuses ou problématiques).

   Une réaction majeure de la gauche à cette nouvelle situation depuis 2008 est la réactivation de la lutte des classes, qu'elle considère apparemment comme l'une de ses catégories principales, même si l'on répète qu'il ne s'agit plus des « vieilles » classes. Les autres problèmes (sexisme, racisme, écologie, etc.) sont alors inclus comme des contradictions secondaires qui pourtant sont supposées ne plus exister. Klaus Dörre souhaite sérieusement un nouveau mouvement social derrière le slogan « expropriez Zuckerberg ».[5] Les classes devraient à nouveau passer avant l' « identité », et le racisme et le sexisme semblent secondaires. Même dans les milieux féministes, on arrive à fabriquer un manifeste féministe pour les 99 % (!).[6] On fait semblant de croire que ces formes de discrimination auraient été sérieusement mises à mal au-delà des niches marginales, puisque dans les années 80 et 90, le discours hégémonique dans les sciences sociales s'est intéressé surtout aux milieux, à la sous-culture, au mode de vie et à l'individualisation. Aujourd'hui, la recherche de coupables est à nouveau en cours. Un marxisme (vulgaire) de personnalisation se répand, les capitalistes, les spéculateurs et les investisseurs étant l'ennemi, ce qui implique bien sûr un antisémitisme structurel.[7]

   Dans le débat sur la décroissance, toutes sortes de concepts existants sont jetés dans un pot et bien mélangés : démocratie économique, économie solidaire, participation des salariés dans l'entreprise, etc. Il s'agit manifestement d'un plat immangeable. Un nouveau « Green New Deal » est également en vogue, comme le montrent des publications telles que celles de Jeremy Rifkin et Naomi Klein. Même la présidente de la Commission européenne von der Leyen est en faveur d'un « Green Deal ».

   Après un centrage sur une nouvelle lecture de Marx, une réflexion sur le fétichisme[8] et l'affirmation : « le capitalisme arrive à sa fin »[9] surgit à présent une focalisation sur la « nouvelle » question de classe.[10] Il manque une perspective critique du fétichisme, selon laquelle le fétiche inclut à la fois l'ouvrier et le capitaliste. Aujourd'hui, tout un chacun se représente le capital comme une menace extérieure, même si, à l'époque, il avait été d'accord avec Schröder, fait le branché dans les années 1990 et découvert la spéculation pour son propre compte. Tout doit donc être résolu à l'intérieur de la forme de la valeur-dissociation. Le problème fondamental de la situation actuelle est essentiellement exprimé dans le discours de Greta Thunberg aux hommes politiques : « Comment osez-vous ?! » - à laquelle les politiciens répondent : « Qu'elle trouve d'abord des réponses pratiques à toutes ces questions ! » En fait, tout le monde est contre le changement climatique (sauf l'AfD et les leurs) : les entrepreneurs, les politiciens, la célèbre société civile.

   Ainsi une impuissance politico-économique commune à résoudre ce problème à l'intérieur du cadre de référence fétichiste devient évidente : La taxe sur le CO2, l'interdiction du diesel, etc. ne sont que mesures symboliques. Ce qu'il faut, c'est un changement fondamental des modes de production et de vie, ainsi que des structures de besoins correspondantes, au-delà de la logique des classes, ouvrière et capitaliste. C'est en principe clair même pour des enfants. Ils le savent, mais ils le font quand même, pourrait-on dire aujourd'hui avec Žižek, mais d'une manière complètement différente de ce que pense ce dernier (voir l'article sur le « marxisme lacanien » de Roswitha Scholz dans ce numéro). Les débats au sujets d'une éco-dictature, que l'on entend deci delà, devraient être contrés par l'analyse de Marcuse sur les faux besoins générés sous le capitalisme et de leur satisfaction tronquée, car il n'existe pas de société émancipée capable de générer d'autres besoins et structures de besoins. Les réponses données actuellement ne rendent aucunement justice au drame de la désintégration des rapports capitalistes-patriarcales.

   Au lieu d'insister sur des changements radicaux dans le sens de cette critique du fétichisme, on tient des pseudo-discours. La gauche tourne en rond et n'a rien produit de nouveau depuis des décennies. Les offres d'utopies et les instructions pour l'action sont nombreuses. Les réponses apportées depuis les années 1970 sont en principe toujours les mêmes. On ne s'attend pas vraiment à des changements radicaux. Un petit discours sur la critique du travail s'est pourtant développé[11] , mais même celui-ci reste dans le cadre social donné, dépourvu de toute transcendance réelle.

   Le grave traumatisme dû à l'effondrement du bloc de l'Est n'est pas du tout traité ni digéré. Et avec lui : la fin de la social-démocratie, l'échec du mouvement alternatif, du mouvement des femmes, du mouvement écologique, etc. qui ont contribué à créer le « nouvel esprit du capitalisme » (Boltanski & Chiapello). A ne pas oublier : la défaite des tentatives de gouvernement de gauche en Amérique latine (Venezuela, Bolivie). Au lieu de cela, on assiste simplement à une nouvelle incantation de toutes les vieilles questions et à la résurgence des illusions correspondantes (démocratie économique, économie solidaire, revenu de base, etc.), qui sont maintenant présentées comme radicales et transcendant le système. Une « mélancolie de gauche » non reconnue (Walter Benjamin, Wendy Brown, Enzo Traverso) se réfugie ainsi dans des rétro-idéologies, des focalisations bornées sur l'utopie et dans l'actionnisme, qui n'ont pas vraiment de quoi s’opposer aux mauvaises conditions et devront se révéler inefficaces. Après le déclin de la social-démocratie ridiculisée, l' « hypersocial-démocratie » est maintenant censée être la solution à tous les problèmes. Ce qui reste caché est le fait que la social-démocratie elle-même n'a été qu'un moteur du développement du capitalisme (en particulier du fordisme) et une nouvelle édition (« verte ») sous l'égide du capitalisme précaire des marchés financiers, des processus de rationalisation progressive, de la concurrence internationale, de l'interdépendance des capitaux, etc. (auxquels s'oppose aujourd'hui aussi la droite extrême) n'est pas possible.[12]

   La gauche est actuellement à nouveau déterminée par un mouvementisme hype ; une théorie qui ne répond pas immédiatement au besoin d'agir et qui pourrait même faire des questions soulevées ici un sujet de discussion a de mauvaises cartes en ce moment. Certes : il ne faut pas tout supporter et se plier aux impératifs de la faisabilité financière (loyer, Hartz IV etc.) et un engagement concret contre le racisme, l'antisémitisme, le néofascisme etc. est par exemple indispensable. Cependant, toute hypostase abstraite de la pratique doit être évitée et le cadre de référence social et historique doit être pensé. Il est nécessaire de prendre en compte l'abstraction de la valeur-dissociation et de regarder la fameuse totalité, également pour pouvoir voir dans quelle mesure certaines actions et certains mouvements travaillent en direction de l'affirmation d'une mise en place de la gestion de crise. Certes, du côté de la critique de la valeur-dissociation, il est nécessaire de voir où il peut y avoir des mouvements qui comportent des moments transcendants auxquels nous pouvons nous mêler pour élargir les horizons intellectuels dans le sens d'une critique de la synthèse sociale. À cet égard, il est impératif d'utiliser les espaces d'action disponibles afin d'améliorer la situation actuelle. Après tout, nous ne vivons plus dans le « monde administré » comme à l'époque d'Adorno, mais dans une période d'« effondrement de la modernisation » (Robert Kurz). Cependant, il ne peut s'agir de courir après les mouvements. La distance critique, l'élaboration théorique et la remise en question de la forme sociale sont particulièrement importantes aujourd'hui, alors que la gauche mainstream croit que tous les problèmes complexes peuvent être résolus à l'intérieur de cette forme, et que les pseudo-solutions sont à l'ordre du jour. Contrairement à la nouvelle lecture de Marx, le but ici n'est pas de mener une exégèse analytique et philologique formelle de Marx, mais de comprendre les concepts marxiens comme des abstractions réelles et de les mettre en rapport avec les changements réels de la société mondiale actuelle. Cela signifie également qu'il faut reconnaître que la politique et la subjectivité (politique) sont en état d'érosion depuis des décennies. Les théories postmodernes en étaient l'expression. Même si les relations solidaires sont très importantes, notamment dans le mouvement des femmes qui vient de renaître, cela ne devrait pas conduire à proclamer, anachroniquement et dans un esprit agit prop, les femmes comme nouveau sujet politique (il faudrait, à nouveau, étudier cette question dans un article séparé). C'est précisément une force de la théorie critique de la valeur-dissociation que de permettre la compréhension des processus et mouvements sociaux dans un continuum social historique et temporel plus large, au lieu d'adopter une perspective réductionniste qui est d'actualité en temps de mouvement : Le concernement et l'immédiateté, sont, au bout de quelques années, régulièrement suivies de la gueule de bois. Les exigences et  les contenus sont alors réduits à un reste immanent au système (on pourrait penser ici au féminisme d'État). Le désir de « devoir enfin vraiment faire quelque chose » masque le fait que l'élaboration de la théorie elle-même est une pratique autonome dans le contexte social global, qui peut servir la pratique sociale visant des processus sociaux de changement seulement si elle ne se livre pas à un fétichisme de la pratique et ne fait pas corps avec lui.[13] Cela semble être le cas lorsque, avec une certaine hostilité envers la théorie, on cherche à aller vers la pratique, sans rien vouloir entendre d'un changement radical indispensable, en se contentant du faux statu quo immédiat, qui de toute façon ne peut pas être maintenu. Alors que ces 30 dernières années, on a insisté sur une position queer et post-coloniale, c'est-à-dire sur une perspective du concernement et du point de vue, à l'heure actuelle, une orientation de classe (pas seulement féministe) des prétendus « 99% », semble vouloir remplacer les théories et idéologies post-modernes. Dans une telle définition de la question sociale, renaît aussi le besoin d'une « normalité » petite-bourgeoise et de l'identification aux masses pour laisser de côté les Autres marginalisé.es et discriminé.es, tout en prétendant les inclure. Le fait que la « question des femmes » et d'autres aient été considérées comme une contradiction secondaire semble avoir été complètement oublié à présent. Cependant, les femmes et les migrant.es sont les plus touché.es par la « question sociale ». La non capacité pratique, le fait d'être superflu.e et marginalisé.e et de ne pas pouvoir s'exprimer est le plus grand crime ici. Les théories postmodernes devraient être blâmées pour leur interprétation culturaliste de cette discrimination et pour être restées coincées dans la « politique de l'identité » au lieu de leur opposer la « question sociale » avec une lourdeur fortement « matérialiste ». Les expériences brisées devraient être considérées et analysées en tant que telles dans le contexte d'un tout historique mondial dans leur décomposition même, et ce, au-delà des hypothèses d'hybridité postmodernes bon marché. Sinon, les possibilités de comprendre un système fétichiste auto-référentiel, que l'homme et la femme ont co-constitué, seraient écartées. Malicieusement, on pourrait dire : celles et ceux qui font vraiment des expériences essentielles ne sont plus aussi centré.es sur l'expérience en tant que telle (le magazine Outside the box dans son numéro actuel, n° 7, a entre-temps pour thème « l'expérience »).

   Même dans des contextes de la critique de la valeur, le besoin de devenir pratique et de renouer avec les expériences directes s'est déjà fait ressentir. L'économie solidaire, les biens communs et l'open source étaient les mots clés ici.[14] Rien ne s'est entre-temps ridiculisé autant que l'idéologie de l'open source. La liberté sur le net a surtout cédé la place au ressentiment, à la salivation d'opinions affectives et à la démagogie, la provocation et le harcèlement. L'idéologie du don et de la gratuité a mué en Uber, etc.

   Claus Peter Ortlieb, décédé le 15.9.2019 et pour lequel nous publions une nécrologie, a toujours résisté à de telles tendances et s'est distancié des développements « théoriques » (récents) de Krisis . À cet égard, l'appropriation dans une nécrologie de Krisis où est fait l'éloge de son texte « Une contradiction entre matière et forme », publié sans gène sur la page d'accueil de Krisis (krisis-online.org du 10.10.2019), est très problématique. Dans ce texte, il avait été important pour lui d'insister sur la pertinence du concept de survaleur relative pour ladite contradiction, que Trenkle, par exemple, ignore dans sa discussion avec Heinrich et qui ne joue toujours pas un rôle décisif dans Krisis. Il a également prononcé des mots sans équivoque contre Streifzüge et Krisis à d'autres égards.[15]

Nous demandons aux lecteurs d'Exit ! de continuer à soutenir, par des dons, nos efforts théoriques qui, depuis toujours, ne peuvent être guidés par des aspirations pratiques immédiates et ne s'inclinent pas devant les restrictions de establishment universitaire de gauche, des intentions de carrière et des attitudes et certitudes bon marché du milieu gauchiste. Aujourd'hui surtout, il faut des intellectuels qui ne courent pas dans la roue du hamster académique ni en termes de contenu ni en termes institutionnels, de « méthode » ou de méthodologie », et qui ne se laissent ni dicter ni gâter leur pensée par celle-la, mais qui regardent le tout social (mondial) hors des sentiers battus. Sans elles et eux, il n'y aura pas de critique sociale vraiment radicale. Dans les anthologies et les congrès, ce sont, depuis des années, voire des décennies, toujours les mêmes personnages qui apparaissent, avec leurs thèses de doctorat. Ils sont exposés à une activité universitaire de plus en plus précaire, c'est pourquoi ils se soumettent ou doivent se soumettre toujours plus à l'académie en tant que père nourricier potentiel, - « Je chante la chanson de celui qui me donne du pain » - est la devise, après tout.

   Dans le passé, la critique de la valeur (-dissociation) a connu un petit essor et est également reprise dans les textes et les références de gauche, mais cela s'arrête quand il s'agit du fond du problème, c'est-à-dire de la remise en question radicale de la forme capitaliste-patriarcale de socialisation. Mais même cette phase semble également être terminée et on préfère souvent se retourner vers un marxisme de l'âge de pierre quelque peu modifié. Après des années de postmodernisme avec son « immobilisme déchaîné » (Paul Virilio), qui a rendu de plus en plus évidente la forme vide de la valeur basée sur la dissociation du féminin, le besoin aujourd'hui est à nouveau de « fixer », d'« identifier », d'avoir des images claires de l'ennemi, afin de désigner des personnes et des groupes comme responsables de la misère, etc : En suivant la logique de l'identité, le monde devrait à nouveau être clairement divisible en haut et bas, amis et ennemis, en bien et mal et le non-identique y est ignoré. De cette façon, le pogrom est préparé mentalement. C'est l'expression du « nouveau sérieux » après la fin du postmodernisme ludique. Les articles de ce numéro d' Exit ! sont encore et toujours dans le contexte de cette critique.

   « Un tour gratuit dans le chaos de la crise »[16] est la réédition d'un texte de Robert Kurz publié dans une anthologie de 1994 aujourd'hui épuisée. Cet essai traite de la folie automobile. Kurz y esquisse l'évolution historique de la mise en place du trafic individuel et montre qu'elle est essentiellement due à l'irrationalité du mode de production capitaliste. Kurz attire l'attention sur ses conséquences destructrices. En outre, il souligne que le transport individuel, l'« auto », n'est pas seulement une technologie, mais est associé à un mode de vie spécifique. Enfin, le « chien de combat verni » sert à la « mobilisation totale » de la force de travail-marchandise et  - en tant qu'objet de consommation - est symboliquement chargé : cela fait également de la folie automobile une folie masculine.

Pour la sortie du numéro 18 d'Exit !, il est également prévu de publier un commentaire sur ce texte, qui mettra à jour l'essai de Kurz et examinera les nouveaux développements de la folie automobile (conduite autonome, mobilité électrique), notamment dans le contexte de la catastrophe climatique déjà en cours.

Žižek est l'un des intellectuels de gauche les plus influents depuis longtemps. Lorsque l'on annonce qu'on écrit quelque chose sur Žižek, on est confronté à de l'incompréhension. Il est confus, creux, polémique, parfois même écarté comme bluffeur et éblouisseur, et à cet égard, il serait totalement indiscutable. La question se pose alors de savoir pourquoi il est en même temps considéré comme honorable, souvent invité et pourquoi les masses affluent à ses conférences. Pourquoi peut-il publier dans des maisons d'édition comme Suhrkamp ou Fischer et est-il considéré comme un « philosophe vedette » ? Dans le texte de Roswitha Scholz « Le capitalisme, la crise ... le divan - et le déclin du patriarcat capitaliste. Quelques remarques critiques sur le marxisme lacanien de Slavoj Žižek et de Tove Soiland »,[17] il s'agit avant tout de critiquer la théorie de Žižek et son parti pris androcentrique à partir du point de vue de la critique de la valeur-dissociation, mais aussi de démontrer au moins de façon rudimentaire son rôle de figure pivot dans la transition du postmodernisme vers une époque autoritaire-anarchique, qui s'accompagne d'une référence semi-ironique à Lénine et Staline dans ses écrits. Il est d'autant plus étonnant que Tove Soiland, dont il s'agit aussi dans ce texte, ignore de tels traits dans l'œuvre de Žižek et tente de faire fructifier sa pensée pour un « marxisme lacanien » féministe de façon a-critique.

Dans la contribution de Thomas Meyer « Au sujet de la misère jamais brisée du positivisme – une note tardive sur l''affaire Sokal' »[18], l'affaire dite de Sokal est examinée. Il y a plus de 20 ans, le physicien Alan Sokal a soumis un faux article à un journal post-structuraliste, qui a été écrit dans le jargon typique du milieu concerné, de sorte que personne n'a remarqué que ce texte n'était pas du tout sérieux. Meyer montre que Sokal reste superficiel dans sa critique de l'absurdité postmoderne et que lui-même n'a rien d'autre à offrir que du positivisme ordinaire. Sokal est loin d'être critique de « l'objectivité inconsciente » (Claus Peter Ortlieb). En outre, Meyer examine la critique sokalienne de la critique féministe de la science et montre que l'auteur, en raison de son androcentrisme et de son incapacité à transcender les limites du positivisme, ne comprend pas du tout, ou n'est pas disposé à comprendre, des aspects essentiels de la critique féministe de la science et doit donc donner aux féministes comme Evelyn Fox-Keller une fin de non-recevoir plus ou moins désinvolte. La pratique de mettre en évidence les déficits de la science académique en faisant passer de faux articles à de prétendus idiots afin de « prouver » que ces branches de la science ne produisent rien d'autre que de pures absurdités n'a pas cessé jusqu'à aujourd'hui. Comme le souligne Meyer, cela pose également problème au sens que toutes sortes de populistes de droite s’agacent contre la prétendue absurdité non scientifique des études de genre, etc. et exigent leur abolition ou leur interdiction. Ainsi, la tricherie avec des articles frauduleux peut être liée à une agitation populiste ou néo-fasciste de droite, comme le montre aussi l'abolition des études de genre en Hongrie.

  Leni Wissen nous livre sa contribution sur l'« Au sujet de l'histoire de l’assistance des pauvres »[19]. Le « travail » en tant que forme centrale d'activité sous le capitalisme implique une relation particulière au non-travail. La relation entre le « travail » et le « non-travail » est cruciale pour la structuration des rapports sociaux. Cela se reflète dans le traitement de la pauvreté, comme le montre l'histoire de l' assistance des pauvres. Avec l'émergence de la société de la valeur dissociation a commencé à prévaloir la distinction entre ceux qui sont dignes, c'est-à-dire les travailleurs, et les indignes, c'est-à-dire les pauvres qui ne travaillent pas, ce qui a eu une influence décisive sur la conception du système de protection sociale naissant. L'histoire de l'assistance des pauvres est étroitement liée à l'histoire de l'antiziganisme. Car dans l'antiziganisme, la discrimination sociale et raciale sont indissociables. Au vu des tendances générales à l'anomie dans le cadre de la dynamique de crise postmoderne du capitalisme, un « antiziganisme structurel » (Roswitha Scholz) semble être la manière idéale de réagir à la crise pour une classe moyenne en dépérissement et doit également être considéré comme un bruit de fond pour la restructuration de l'État providence dans le capitalisme en déclin, ce que Wissen montre de manière exemplaire au sujet de l'« État providence d'activation» en Allemagne.

Dans sa contribution, Andreas Urban se concentre sur l'histoire des maisons de retraite en tant qu'institution moderne. Ce faisant, il suit directement sa thèse, développée dans un article précédent (dans : Exit ! n° 15), disant que dans le capitalisme, les personnes âgées constituent un « superflu » (comme fondement d'une hostilité structurelle envers la vieillesse dans les sociétés modernes) - un superflu qui est matériellement objectivé de manière peut-être particulièrement impressionnante dans les maisons de retraite. Il montre que la maison de retraite est, historiquement et logiquement, une institution de garde des personnes âgées « improductives » et « superflues ». Cette fonction est toujours valable aujourd'hui, malgré les nombreux changements superficiels que les maisons de retraite ont traversés au cours des dernières décennies. Cela se traduit notamment par le fait que la ségrégation spatiale et sociale et l'enfermement de facto des personnes âgées et des personnes ayant besoin de soins sont toujours l'essence des maisons de retraite et des maisons de repos même les plus confortables et les plus accueillantes. En outre, les soins aux personnes âgées font l'objet (surtout au niveau institutionnel, mais pas exclusivement) de calculs économiques coûts-bénéfices ainsi que de logiques temporelles résultant de la structure capitaliste de la valeur-dissociation. Dans ce contexte, l'article donne également un aperçu critique des phénomènes et des tendances qui sont actuellement débattus dans la science et les médias sous les mots clés « crise des soins » et « urgence des soins », comme par exemple l'économisation progressive, les conditions de travail inacceptables, la négligence et la violence à l'égard des usagers etc., dans ce secteur.

Les églises sont également entraînées dans le maelström de la crise. Leur crise se manifeste sur le plan économique par une diminution durable des ressources financières et, sur le plan du contenu et sur le plan symbolique, par une perte de signification sociale et politique. Tout comme dans les secteurs « laïques », les églises sont également confrontées à des « réformes ». Le texte d'Herbert Böttcher « Sur la voie d'une "Église entrepreneuriale" après la chute de la (post-)modernité »[20] montre comment les Églises veulent se réformer dans « l'esprit du capitalisme » plutôt que dans celui du « Saint-Esprit ». Elles recherchent des conseils sur les concepts de développement organisationnel qui fonctionnent sur la base de la théorie des systèmes. En tant qu'entreprises, les églises veulent se connecter à leur environnement et être à la hauteur de l'époque. Il en résulte des processus d'adaptation à une société (post-)moderne en pleine crise et dégradation. Il ne s'agit pas seulement d'une adaptation organisationnelle. Elle ne peut être utile que si les produits pastoraux et religieux proposés par les églises sont compétitifs sur les marchés ésotériques et spirituels et répondent aux besoins de leurs clients. Les gens doivent être touchés dans leur « vie quotidienne » et dans leurs « espaces sociaux ». Sans réflexion sur les contextes sociaux de médiation, les personnes stressées et conduites à la dépression par la pression des conditions de crise devraient être touchées et soignées de manière qu'elles se sentent à nouveau bien ou du moins mieux dans les circonstances actuelles. Les produits ésotériques religieux proposés ne doivent pas être mesurés à l'aune de leur prétention à la vérité mais à leur utilité. Dans le même temps, l'église devrait être un foyer pour les personnes en quête de sens et d'identité face au « relativisme » du postmodernisme. En vue de ces problématiques, les églises s'ouvrent à la pensée et à l'action identitaires et autoritaires. Tout cela ne laisse pas intact le contenu de la tradition judéo-chrétienne. Elles sont individualisées et ésotérisées et doivent être garanties ou bien sur le plan existentiel et/ou dans l'objectivité des « vérités éternelles ». Les contenus émancipatoires de la tradition judéo-chrétienne, qui reposent sur une distinction entre transcendance et immanence, aiguisée par une critique de la domination, sont laissés de côté.

La contribution de Gerd Bedszent « La marche vers la barbarie ou l'Est comme croque-mitaine »[21] traite du battage médiatique autour du 30e anniversaire de la chute du mur de Berlin, mais aussi de la violence de l'extrême droite qui a fait rage en particulier dans les régions reculées de l'Allemagne de l'Est. Bedszent cite plusieurs textes déjà anciens de Robert Kurz et analyse les liens entre les deux événements. La majorité des sites industriels est-allemands, qui étaient déjà en concurrence avec les économies occidentales plus fortes et déjà en déclin, ont finalement reçu le coup de grâce final après 1990. Au cours de la désindustrialisation de régions entières, plusieurs millions de personnes ont perdu leur emploi ; pour d'autres, la « rationalisation » des institutions administratives et la dévastation de grandes parties du paysage culturel ont mené à une interruption de carrière durable. Le fait que certaines parties de la population est-allemande ont été héroïsées par les médias, mais que ces mêmes personnes ont été souvent considérées comme économiquement « superflues », fournit le terrain propice à de nombreuses théories conspirationnistes, confuses et souvent antisémites. Cependant, comme l'écrit Bedszent en référence à Robert Kurz, la vague actuelle d'extrémisme de droite a sa cause structurelle dans la crise finale du système de production marchande. En réaction perverse à cette crise, les politiciens de la droite plus ou moins extrême réclament à grands cris le renforcement des mêmes institutions de l'État-nation qu'ils affaiblissent en réalité avec leur programme de politique économique.

Les livres et anthologies suivants ont également été publiés : Les deux parties de La Substance du capital de Robert Kurz (dans : Exit ! 1 & 2) ont été traduites en français[22] ainsi qu'un recueil d'articles de Roswitha Scholz.[23] De plus, le premier numéro du magazine francophone Jaggernaut a été proposé au public[24] qui contient (entre autres) des textes de Robert Kurz et Roswitha Scholz en traduction. Le livre Weltordnungskrieg [Guerre pour l'ordre mondial] de Robert Kurz a été traduit en portugais, mais malheureusement seuls des extraits seront publiés par Antigona (Lisbonne)[25]. Ne travailllez jamais. La critique du travail en France de Charles Fourier à Guy Debord, par Alastair Hemmens, a été publié, en anglais[26] et simultanément en français [27]. La Société autophage - capitalisme, démesure et autodestruction d'Anselm Jappe a été publié en espagnol[28] et, du même auteur, Les Aventures de la marchandise, en italien [29] Un recueil de textes de Claus Peter Ortlieb a été publié  en Allemagne[30] ; est sorti aussi, en Allemagne, le livre de Raimund G. Philipp L'histoire de la Chine comme histoire de rapports fétichistes, critique de la retroprojection de catégories modernes sur la pré-modernité : la fin du néolithique ; les trois dynasties[31].

Daniel Späth et Patrice Schlauch ont démissionné du comité de rédaction.

Roswitha Scholz pour la rédaction d'Exit ! en décembre 2019.

Traduit de l'allemand par Johannes Vogele. 

 


[1]Cf. par exemple : «  Wir erleben eine Balkanisierung des Welthandels » [Nous vivons une balkanisation du commerce mondial], handelszeitung.ch du 2.9.2019.

[2]Der größte Crash aller Zeiten. Wirtschaft, Politik, Gesellschaft. Wie Sie jetzt noch ihr Geld schützen können, Eichborn, 2019.

[3]L'énorme haine dont Thunberg fait l'expérience est significative, voir par exemple Hinz, Enno ; Meyer, Lukas Paul : « Gegenwind für die Klimabewegung » [contre-courant pour le mouvement pour le climat], akweb.de du 12.11.2019 ou Analysis & Criticism n° 654.

[4]Selon Amnesty International, le nombre de victimes est certainement beaucoup plus élevé, comme le montre une documentation de France 24 Observers : https://observers.france24.com/en/video/iran'-hidden-slaughter-video-investigation-france-24-observers. La situation en Irak est similaire. Cf. par exemple Karam Hassawy : « Revolutionärer Herbst im Irak » [Automne révolutionnaire en Irak], jungle world du 23.11.2019

[5]Dans : Ketterer, Hanna ; Becker, Karina (eds.) : Was stimmt nicht mit der Demokratie? [Qu'est-ce qui ne va pas avec la démocratie ?] - Un débat avec Klaus Dörre, Nancy Fraser, Stephan Lessenich et Hartmut Rosa, Francfort 2019, p. 20.

[6]Fraser, Nancy et d'autres : Feminismus für die 99% – Ein Manifest» [Le féminisme pour les 99% - Un manifeste], Berlin 2019.

[7]Comme Paul Mason dans une interview : FR-online.de à partir du 28.9.2019.

[8]Cf. Scholz, Roswitha : « Fetisch Alaaf! – Zur Dialektik der Fetischismuskritik im heutigen Prozess des ›Kollaps der Modernisierung‹ – Oder: Wie viel Establishment kann radikale Gesellschaftskritik ertragen? » «[Fetish hip hip hourra ! - Sur la dialectique de la critique du fétichisme dans le processus actuel de « l'effondrement de la modernisation » - Ou : Jusqu’où la critique sociale radicale peut- elle s’établir dans l’université sans perdre sa radicalité ? dans : Exit ! - Krise und Kritik der Warengesellschaft n° 12, Angermünde 2014, 77-117.

[9]Cf. l'éditorial d’Exit ! No. 14

[10]Cf. Meyer, Thomas : « Neue Klassenpolitik? – Kritische Anmerkungen zu aktuellen Diskursen » [Nouvelle politique de classe ? - Remarques critiques sur les discours actuels], 2019, sur exit-online.org.

[11]Par exemple dans le documentaire de 2012 « Frohes Schaffen - Ein Film zur Senkung der Arbeitsverhalten » [Travail heureux, un film pour la baisse du moral du travail] de Konstantin Faigle et dans divers livres, par exemple Spät, Patrick : Und was machst du so ? - Fröhliche Streitschrift gegen den Arbeitsfetisch [Et toi, tu fais quoi ? - Joyeux pamphlet contre le fétichisme du travail], Zurich 2014.

[12]Cf. Kurz, Robert : Das Weltkapital - Globalisierung und innere Schranken des modernen warenproduzierenden Systems [Le capital mondial, mondialisation et bornes internes du système moderne de production de marchandises], Berlin 2005.

[13]Cf. également le texte de Robert Kurz : « Grau ist des Lebens Goldner Baum – das Praxis-Problem als Evergreen verkürzter Kapitalismuskritik und die Geschichte der Linken » [Gris est l'arbre d'or de la vie et le vert est la théorie - le problème pratique comme une critique abrégée du capitalisme et de l'histoire de la gauche], dans : Exit ! - Krise und Kritik der Warengesellschaft No. 4, Bad Honnef 2007, 15-106 [à paraître en français].

[14]Cf. Kurz, Robert : « Der Unwert des Unwissens - Verkürzte 'Wertkritik' als Legitimationsideologie eines digitalen Neo-Kleinbürgertums » [La non-valeur du non-savoir, critique tronquée de la valeur comme idéologie de légitimation d'une nouvelle petite bourgeoisie digitale ] dans : Exit ! - Krise und Kritik der Warengesellschaft Nr.5, Bad Honnef 2008, 127-194, également sur exit-online.org.

[15]voir à ce propos : « Zur Spaltung der Krisis-Gruppe [Sur la scission du groupe Krisis : Déclaration d'anciens membres du groupe de rédaction et de parrainage], 11.4.2004 ; Ortlieb, Claus Peter : Die Sinnlichkeit des MWW [la sensiblilité du MOB (masculin, occidental, blanc)], 13.7.2009 ; tous deux sur exit-online.org

[16]Freie Fahrt ins Krisenchaos 

[17]Der Kapitalismus, die Krise … die Couch […] und der Zerfall des kapitalistischen Patriarchats – Kritische Bemerkungen zu  Slavoj Žižek und Tove Soiland.

[18]Zum ungebrochenen Elend des Positivismus  - ein verspäteter Nachtrag zur « Sokal-Affäre ».

[19]Zur Geschichte der Armenfürsorge

[20]Auf dem Weg zu einer « unternehmerischen Kirche » im Anschluss an die abstürzende (Post-)Moderne.

[21]Vom Marsch in die Barbarei oder der Osten sls Buhmann

[22]La Substance du capital, l'échappée, Paris 2019 ;

[23]Le Sexe du capitalisme - « Masculinité » et « féminité » comme piliers du patriarcat producteur de marchandises, Crise & critique, Albi 2019.

[24]Jaggernaut - Crise et critique de la société capitaliste-patriarcale, Crise et critique, Albi 2019

[25]Le texte intégral peut être consulté à l'adresse suivante : https://exit-online.org/pdf/A_Guerra_de_Ordenamento_Mundial-Robert_Kurz.pdf

[26]The Critique of Work in Modern French Thought, Palgrave Macmillan 2019

[27]Ne travaillez jamais, Crise & critique, Albi 2019

[28]La sociedad autófaga, Logroño 2019.

[29]Le Avventure della Merce - Per una Nuova critica del valore, Rome 2019.

[30]Zur Kritik des modernen Fetischismus - Die Grenzen bürgerlichen Denkens, Schmetterling-Verlag Stuttgart 2019

[31]Die Geschichte Chinas als Geschichte von Fetischverhältnisen - Zur Kritik der Rückprojektion moderner Kategorien auf die Vormodne : ausgehendes Neolithikum, die drei Dynastien, Darmstadt 2019.

Tag(s) : #Chroniques de la crise au quotidien
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