Palim Psao propose un ensemble de textes et videos portant sur les courants de la critique de la valeur (Wertkritik) et de la critique de la valeur-dissociation (Wert-abspaltungskritik), autour des oeuvres de Robert Kurz, Anselm Jappe, Roswitha Scholz, Norbert Trenkle, Ernst Lohoff, Moishe Postone, Clément Homs, Johannes Vogele... et des revues Krisis, Exit ! et Jaggernaut
Ce dimanche 2 mai à la Maison du savoir, après la chronique de Rachel Badinter dès 16h, Ivan Recio présentera à 17h30 l'état de ses recherches autour d'André Gorz et la critique de la valeur-dissociation. Cette intervention est l'ouverture d'un cycle sur André Gorz et les pistes ouvertes par cette première intervention, qui sera repris dans de prochaines séances, dans un futur proche :
André Gorz et la critique de la valeur-dissociation :
Tentative d’un croisement « à contre-courant »
La critique de la valeur, développée en critique de la valeur-dissociation, ne permet pas seulement une refondation théorique à partir et au-delà de Marx, mais aussi des relectures critiques d’autres développements théoriques. Nuno Machado dans sa récente thèse de doctorat, « O caminho do sacrifício, ou retrato do capital como forma social de fetiche » procède à une relecture décisive de la critique de la valeur chez Marx et Robert Kurz, mais propose aussi une metathéorie qui ouvre sur des relectures, notamment de Pierre Bourdieu. C’est dans cette même perspective que nous aimerions nous adonner à une relecture d’André Gorz. Machado a par ailleurs écrit plusieurs articles sur Gorz, dont un article décisif pour nos propres développements, sur lequel nous reviendrons, qui compare le « dernier » Gorz et la critique de la valeur. Nous partirons également des écrits de Françoise Gollain, qui démontre dans son livre André Gorz, une philosophie de l’émancipation (L'harmattan), qu’il y a, malgré différentes inflexions dans sa pensée, une continuité à travers le temps chez cet intellectuel francophone.
Alors que c’est le dernier Gorz qui est souvent rapproché de la critique de la valeur, parce qu’il était, à la fin de sa vie, convaincu de la pertinence de ses auteurs/autrices et se sentait « un des leurs », le reste de son œuvre est très vite qualifié, notamment par Alastair Hemmens dans Ne travaillez jamais, comme relevant du marxisme traditionnel.Pourtant, ce qu’Hemmens développe dans son livre à propos d’autres auteurs aurait pu être développé également pour André Gorz. La perspective de Hemmens est pour nous également un point de départ et un modèle. Nous voulons montrer qu’un croisement à contre-courant, entre le premier André Gorz – le plus éloigné dans le temps de la critique de la valeur - et la critique de la valeur-dissociation, telle qu’elle s’est développée après la disparition de Gorz, serait très fécond pour déployer certains développements devenus clés comme celui de la critique de la forme-sujet, mais aussi à propos d'un concept plus classique, celui de fétichisme. Il ne s’agit pas pour nous de plaquer la critique de la valeur sur André Gorz ni de dire que Gorz serait un « théoricien critique de la valeur » avant l’heure, mais de procéder à une relecture originale de ses premiers écrits, et d’en montrer une radicalité méconnue, qui serait à réaffirmer dans le cadre de la critique de la valeur-dissociation.
« André Gorz et la critique de la valeur », par Anselm Jappe, paru dans A. Caillé et C. Fourel (dir.), Sortir du capitalisme. Le scénario Gorz, Le Bord de l'eau, 2013.