Le rôle du temps abstrait dans la dynamique et la crise du capitalisme
La discussion/opposition entre Moishe Postone et Robert Kurz
[Séminaire d’Anselm Jappe]
La séance du 12 décembre 2016 du séminaire d’Anselm Jappe au Collège international de philosophie (Paris), se rapporte au rôle du temps abstrait dans la valorisation de la valeur, la dynamique et la crise du capitalisme. Alors que les précédentes séances du séminaire de cette année (sur la thématique du « temps abstrait »), restaient plutôt sur un domaine historique et factuel, cette séance revient sur des domaines plus conceptuels : un retour à la critique radicale de l’économie politique. La séance présente la discussion fondamentale entre Postone et Kurz au sujet de la théorie de la crise.
La diminution du temps nécessaire pour chaque marchandise particulière produite, comporte-t-elle une redéfinition de la valeur et de l’heure sociale de travail, comme l’affirme Moishe Postone, ou conduit-elle au contraire à une désubstantialisation de la masse de la valeur, conduisant à la crise du capitalisme, comme tente de le démontrer Robert Kurz ?
La différence entre temps abstrait et temps concret mène, on le verra, à la dichotomie entre richesse matérielle et richesse abstraite. Dans son geste, la Wertkritik cherchant toujours, non pas à fétichiser Marx, mais à aller avec Marx, au-delà de Marx, on reviendra dans un tout premier temps sur l’importance chez Marx du concept d’« économie du temps », mais aussi sur les faiblesses de Marx sur cette question dans les Grundrisse et Le Capital, quand Marx se place trop dans l’horizon moderne du temps. Car si Marx a réfléchi à la nature (double) du travail au moins dans son œuvre de la maturité (et pas sans contradictions) et qu’il a reconnu l'importance de l’économie du temps, il n’a pas vu et approfondi la nature et la spécificité de ce temps, ce que fera pour la première fois de manière aussi approfondie pour un auteur se réclamant de Marx, Moishe Postone dans Temps, travail et domination sociale (Georg Lukács développe plutôt d'intéressantes réflexions sur la question de la spatialisation du temps, dans Histoire et conscience de classe).
Le fichier de l'enregistrement est disponible 30 jours avec le lien suivant :
La prochaine séance se tiendra le 9 janvier 2017. Le lieu doit être confirmé (à vérifier sur le site du CIPh).
PS : Nous précisons aussi pour les lecteurs avertis, qu'il y a en particulier au niveau de la théorie de la crise, des différences théoriques fortes entre Krisis-post 2004 (dont les vues sont présentées en français dans le livre d'Ernst Lohoff et Norbert Trenkle, La Grande dévalorisation, Post-éditions, 2014) et la théorie kurzienne.
Bibliographie sur le thème de cette séance :
- Les chapitres V et VIII (« Temps abstrait » et « La dialectique du travail et du temps ») du maître-ouvrage de l’historien et théoricien nord-américain Moishe Postone, Temps, travail et domination sociale. Une réinterprétation de la théorie critique de Marx (Mille et une nuits, 2009).
- Robert Kurz, « Die Substanz des Kapitals. Abstrakte Arbeit als gesellschaftliche Realmetaphysik und die absolute innere Schranke der Verwertung » [« La substance du capital. Le travail abstrait comme métaphysique réelle de la société et la borne interne absolue de la valorisation »], Exit!, n° 1 et 2, Horlemann, 2004-2005. On peut se reporter aux traductions anglaise, portugaise et italienne de ce texte.
- Paraîtra en janvier 2017 la traduction de l'article d'Ernst Lohoff, « Autodestruction programmée. A propos du lien interne entre la critique de la forme-valeur et la théorie des crises dans la critique marxienne de l'économie politique » (in revue Illusio, éd. Bord de l'eau, n°16/17), où on retrouvera un paragraphe au sujet du problème de l'absence de théorie de la crise chez Postone.
- Richard Aabromeit, Wert ohne Krise – Krise ohne Wert ? Zur Absenz einer Krisentheorie bei Moishe Postone (paru dans Exit !, n°13, Horlemann, 2016).
- Voir aussi les derniers développements théoriques dans Robert Kurz, Geld ohne Wert. Grundrisse zu einer Transformation der Kritik der politischen ökonomie, Horlemann, 2012 (traduction portugaise disponible chez Antigona-Lisbonne, et bientôt en italien).
- Voir aussi sur la théorie de la crise, les deux fragments du livre posthume de Robert Kurz, « Krise und Kritik I », Exit !, n°10, 2012 (première partie) et - Kurz, Robert, « Krise und Kritik. II”, Exit !, n°11, 2013 (deuxième partie), la revue est toujours chez Horlemann, on peut facilement la commander en ligne pour un envoi en France.